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Loi santé au travail : quelles évolutions pour le DUERP ?
La loi du 2 août 2021 entend renforcer la prévention primaire. Parmi les leviers choisis : le DUERP, document unique de prévention des risques professionnels. Les plus grandes entreprises devront avoir un programme de prévention structuré, quand une liste d’actions de prévention suffira pour les TPE. Le rôle du CSE pour élaborer le DU est renforcé.

Alors que le document unique fête ses 20 ans (D. n°2001-1016, 5 nov. 2001 : JO, 7 nov.), il est renforcé par ce texte. En effet, un nouvel article du code du travail rappelle la finalité de l’évaluation des risques qui est de hiérarchiser les risques pour définir des actions de prévention pertinentes.
Un ajout dans le code du travail précise par ailleurs que l’employeur doit évaluer les risques pour la santé et la sécurité des travailleurs « compte tenu de la nature des activités de l’établissement, […] y compris dans le choix des procédés de fabrication, des équipements de travail, des substances ou préparations chimiques, dans l’aménagement ou le réaménagement des lieux de travail ou des installations, dans l’organisation du travail et dans la définition des postes de travail ». Cette évaluation des risques tient compte de l’impact différencié de l’exposition au risque en fonction du sexe.
Un programme de prévention structuré pour les grandes entreprises et le PME, une liste d’actions de prévention pour les TPE
Dans la version de la proposition de loi votée par le Parlement en février 2021, toutes les entreprises avaient l’obligation de construire un programme annuel de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail, sur la base du DUER. Lors d’une audition au Sénat (du 15 juin 2021), Stéphane Artano (rapporteur et sénateur RDSE de Saint-Pierre-et-Miquelon) estimait que cette obligation d’un programme de prévention pour toutes les entreprises semblait « excessive pour entraîner l’ensemble des TPE-PME, qui constituent 98% du tissu économique français, dans un mouvement de prévention de la santé au travail ». Un avis partagé par le secrétaire d'État Laurent Pietraszewski.
Dans le texte final de la loi (art. 3), ce programme de prévention structuré reste – comme aujourd’hui – obligatoire pour les entreprises d’au moins 50 salariés et il doit bien découler du document unique. Ses modalités sont précisées (C. trav., art. L. 4121-3-1). Il doit contenir :
- la liste détaillée des mesures devant être prises au cours de l’année à venir, avec, pour chaque mesure : ses conditions d’exécution, des indicateurs de résultat, l’estimation de son coût ;
- les ressources de l’entreprise pouvant être mobilisées ;
- un calendrier de mise en œuvre.
Pour les entreprises de 11 à 49 salariés, l’obligation est proportionnée à la taille de l’entreprise. Il ne s’agit pas d’avoir un programme de prévention aussi formalisé.
Selon le texte final, l’employeur doit obligatoirement définir, selon l’évaluation des risques, une liste « d’actions de prévention des risques et de protection des salariés ». Cette liste « peut être consignée dans le document unique d’évaluation des risques professionnels et ses mises à jour ».
Le Sénat avait ajouté cette obligation pour les plus petites entreprises alors que ce point n’était pas dans l’ANI. Ainsi que l’a rappelé Mr Philippe Garabiol du Coct (audition au Sénat du 31 mars 2021) :
« S’agissant du caractère universel du programme annuel de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail, il n’y a ni accord ni désaccord des partenaires sociaux, puisqu’ils n’en ont pas débattu. Toutefois, le dialogue social a fait émerger quelques lignes fortes : l’égalité de traitement, l’universalisme et, en termes de méthode, l’accompagnement des TPE et des PME afin d’aider ces entreprises à remplir leurs obligations ».
Le rôle des branches
Le même article (C. trav., art. L. 4121-3-1, IV) précise le rôle de branches. Celles-ci « peuvent accompagner les entreprises » pour faire et mettre à jour le DUER, mais aussi pour définir les actions de prévention (que ce soit dans le programme annuel de prévention pour les entreprises de plus de 50 salariés ou pour la liste des actions de prévention pour les petites structures).
Les organismes des branches peuvent ainsi créer des méthodes et des référentiels adaptés aux risques d’un secteur, ainsi que des « outils d’aide à la rédaction ». L’OPPBTP met ainsi par exemple déjà deux outils à disposition des entreprises du bâtiment : « MonDocUnique Prem's » pour les petites entreprises artisanales qui propose une méthodologie simplifiée par grande famille de métier, et « Mon évaluation des risques » qui couvre plus de 35 risques, 200 situations de travail, 400 actions de prévention. Des fédérations, comme celle de l’habillement, ont aussi participé à la construction de modules sectoriels de l’outil de l’INRS, OiRA (Online interactive risk assessment).
Cette nouvelle disposition de la loi est cohérente avec l’ANI de décembre 2020 qui souhaitait « promouvoir le rôle des branches professionnelles », notamment par le biais de mise à disposition d’outils par les branches. L’ANI allait même plus loin, il citait « l’élaboration de plans d’actions sectoriels donnant lieu à convention avec la branche AT-MP » et la mise à disposition d’outils utiles à la prévention : « fourniture de supports numériques pour faciliter l’identification et l’évaluation des risques professionnels, définition des contenus de formation propres à leurs métiers, intégration dans ces formations pilotées par les professions des éléments de bonnes pratiques de prévention respectant les règles de l’art des métiers concernés, etc. »
La double finalité du DUER : prévenir et tracer
Le DUER doit non seulement répertorier « l’ensemble des risques professionnels auxquels sont exposés les travailleurs » mais il est également supposé « assurer la traçabilité collective de ces expositions » (C. trav., art. L. 4121-3-1, I). Ce point était présent dans l’ANI selon lequel « la finalité de la traçabilité est le développement de la prévention primaire ».
Sur le risque chimique, l’ANI souhaitait notamment qu’une information synthétique soit extraite de différents documents réglementaires : déclaration de l’employeur pour les suivis individuels renforcés (SIR), notice de postes, fiche d’entreprise du SPSTI (service de prévention et santé au travail interentreprises), DUERP, fiches de données de sécurité, etc., pour alimenter la traçabilité des expositions des salariés suivis en surveillance renforcée, de manière à satisfaire aux exigences de la directive 2004/37/CE.
Archivage et conservation du DUERP
La loi introduit une obligation d’archivage du document unique. Celui-ci devra être conservé pendant au moins 40 ans de façon dématérialisée. Le texte précise que les différentes versions du DUER doivent être tenues à disposition des travailleurs, mais aussi « des anciens travailleurs ainsi que de toute personne ou instance pouvant justifier d’un intérêt à y avoir accès » (C. trav., art. L. 4121-3-1, V).
Les modalités de conservation et de mise à disposition du document ainsi que la liste des personnes et instances seront fixées par décret en Conseil d’État.
Le DUER doit non seulement être conservé par l’entreprise, mais il doit aussi être déposé « sur un portail numérique déployé et administré par un organisme géré par les organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel ». Le texte précise que ce portail doit préserver « la confidentialité des données contenues dans le document unique » et que l’accès doit être restreint (par l’intermédiaire d’une procédure d’authentification sécurisée) aux personnes et aux instances habilitées à le déposer ou à y avoir accès.
Les organisations patronales devront définir le cahier des charges du déploiement et du fonctionnement du portail numérique, après avis conforme de la Cnil, ainsi que les statuts de l’organisme gestionnaire du portail numérique. Et l’exécutif fixera les modalités et les délais par voie réglementaire.
En termes de dates, le DUER devra être déposé sur ce portail :
- à compter du 1er juillet 2023, pour les entreprises de 150 salariés et plus ;
- à compter de dates fixées par décret, en fonction des effectifs des entreprises, et au plus tard à compter du 1er juillet 2024, pour les entreprises dont l’effectif est inférieur à 150 salariés.
Qui contribue au DUER ?
La loi précise que le service de prévention et de santé au travail auquel l’employeur est affilié « apporte sa contribution » à l’évaluation des risques professionnels (C. trav., L. 4121-3). Cela peut être des professionnels de santé mais aussi des intervenants en prévention des risques professionnels du service de santé au travail interentreprises.
Le SPST doit aussi recevoir de la part de l’employeur le DUER à chaque mise à jour (C. trav., art. L. 4121-3-1, VI).
Le texte indique que d’autres personnes et organismes peuvent être sollicités par l’entreprise pour l’évaluation des risques professionnels (C. trav., art. L. 4121-3). Il s’agit des services de prévention des caisses de sécurité sociale avec l’appui de l’INRS (dans le cadre des programmes de prévention mentionnés à l’article L. 422-5 du code de la sécurité sociale), de l’OPPBTP et de l’Anact et son réseau.
Quel rôle pour le CSE ?
Le texte de loi précise l’implication du CSE dans l’élaboration du DUER.
Pour rappel le CSE « contribue à promouvoir la santé, la sécurité et l’amélioration des conditions de travail dans l’entreprise et réalise des enquêtes en matière d’accidents du travail ou de maladies professionnelles ou à caractère professionnel ».
Pour les entreprises entre 11 et 49 salariés, la loi sur la santé au travail ajoute l’obligation pour l’employeur de présenter au CSE « la liste des actions de prévention et de protection » qui découle du DUER (C. trav., art. L 2312-5).
Pour les entreprises de plus de 50 salariés, en plus du bilan sur la situation générale de la santé, de la sécurité et des conditions de travail dans l’entreprise, l’employeur doit aussi présenter au CSE le programme annuel de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail (C. trav., art. L. 2312 27).
Cette obligation existait déjà dans le code du travail, elle est simplement reformulée.
La loi indique que le CSE est consulté sur le document unique et sur ses mises à jour (C. trav., art. L. 4121-3). Jusqu’alors, le code du travail ne prévoyait pas de consultation sur le DUER, mais seulement une mise à disposition du document. Désormais, le CSE a un vrai rôle à jouer dans l’élaboration du DUER : la loi stipule que « dans le cadre du dialogue social dans l’entreprise, le CSE et sa CSSCT apportent leur contribution à l’évaluation des risques professionnels dans l’entreprise » (C. trav., art. L. 4121-3). Il est véritablement question d’une participation et pas seulement d’une consultation ou mise à disposition du document.
En pratique, un certain nombre d’entreprises associaient déjà le CSE (ou la CSSCT quand elle existe, à l’instar du CHSCT disparu) à la mise à jour du DUER.
Par Clémence Andrieu
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