Moins de visites médicales de reprise, davantage de visites de préreprise

Un décret, publié le 16-03-2022 au Journal officiel, pris pour l'application de la loi Santé au travail recentre l’action des services de santé au travail vers les salariés exposés à des risques, victimes d’accident ou de maladie professionnelle, ou absents pour une longue durée.

La visite médicale de reprise, après 60 jours d'arrêt de travail d'origine non professionnelle

Actuellement, l’obligation pour l’employeur d’organiser une visite médicale de reprise au bénéfice du salarié après certaines absences est prévue par l’article R.4624-31 du code du travail. Cette visite doit en effet être organisée après :

  • un congé de maternité ;
  • une absence pour cause de maladie professionnelle, quelle qu’en soit la durée ;
  • une absence d’au moins 30 jours pour cause d’accident du travail, de maladie ou d’accident non professionnel.

La loi réformant la santé au travail a inscrit cette obligation dans la partie législative, et non plus réglementairedu code du travail. Un nouvel article L.4624-2-3, entrant en vigueur le 31 mars 2022, pose en effet le principe de l’organisation d’un examen de reprise pratiqué par le médecin du travail au terme d’un congé de maternité ou d’une absence pour maladie ou accident, renvoyant à un décret le soin de fixer les modalités de son application.

L’article R.4624-31 du code du travail aurait pu être maintenu en l’état. Il fait toutefois l’objet d’une modification importante : pour les arrêts de travail résultant d’un accident ou d’une maladie non professionnelle et débutant après le 31 mars 2022, seule une absence d’au moins 60 jours (au lieu de 30 jours auparavant) impose l’organisation d’une visite médicale de reprise (article R.4624-31, alinéa 5 nouveau du code du travail).

► Le projet de décret transmis aux partenaires sociaux prévoyait également de réserver la visite médicale de reprise dont bénéficie toute salariée à l’issue d’un congé de maternité aux jeunes mères bénéficiant d’un suivi médical renforcé, ou aux cas de demande expresse de la salariée, de l’employeur ou du médecin du travail. Cette limitation a finalement été abandonnée, et la visite de reprise demeure obligatoire à l’issue du congé de maternité.

Des visites de préreprise dès 30 jours d'arrêt de travail

La loi réformant la santé au travail a également déplacé, de la partie réglementaire à la partie législative du code du travail, la possibilité pour les salariés en arrêt de travail de longue durée de bénéficier d’une visite de préreprise, dont le but est de préparer la reprise du travail. Un nouvel article L.4624-2-4 du code du travail traite en effet de cette visite, en renvoyant à un décret le soin de fixer la durée de l'absence du salarié ouvrant droit à cet examen médical.

Pour les arrêts de travail débutant après le 31 mars 2022, la visite de préreprise peut être organisée au bénéfice des travailleurs absents depuis plus de 30 jours, au lieu de trois mois auparavant (article R.4624-29 modifié du code du travail).

 Rappelons que l’organisation de la visite de préreprise, facultative, peut être initiée par le salarié, son médecin traitant ou les services médicaux de l’assurance maladie. À compter du 31 mars 2022, l’initiative d’organiser un examen médical de préreprise pourra également être prise par le médecin du travail lorsque le retour du salarié à son poste est anticipé, ce qui est une nouveauté (article L.4624-2-4 du code du travail).

Vers une meilleure surveillance post-exposition professionnelle des salariés

La visite médicale "post-exposition", réservée depuis octobre 2021 aux salariés exposés à des facteurs de risque au cours de leur carrière et partant à la retraite, peut désormais être organisée en cours d'exécution du contrat de travail. Cette visite, instaurée par la loi du 29 mars 2018, est entrée en vigueur le 1er octobre 2021, après la publication du décret permettant son application.

Initialement réservée aux salariés en fin de carrière ayant bénéficié, au cours de leur vie professionnelle, d’un suivi individuel renforcé, le dispositif a été étendu par la loi réformant la santé au travail. L’article L.4624-2-1 du code dgu travail, modifié, impose en effet, à compter du 31 mars 2022, l’organisation de la visite médicale "post-exposition" dans les meilleurs délais après la cessation de l'exposition des salariés à des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité ou, le cas échéant, avant leur départ en retraite.

Les articles R.4624-28-2 et R.4624-28-3 du code du travail, ainsi que l’article R.717-16-3 du code rural et de la pêche maritime, qui mettent en œuvre le dispositif, sont modifiés pour tenir compte de l’élargissement du dispositif.

► Les risques particuliers sont ceux visés à l'article R.4624-23, I du code du travail : risques liés à une exposition à l’amiante, au plomb, aux agents cancérogènes ou biologiques, aux rayonnements ionisants, au risque hyperbare, au risque de chute, etc.

Ainsi, l’employeur doit informer le service de prévention et de santé au travail, dès qu’il en a connaissance :

  • de la cessation de l’exposition d’un travailleur de l’entreprise à des risques particuliers pour sa santé ou sa sécurité justifiant d’un suivi individuel renforcé ;
  • ou du départ ou de la mise à la retraite d’un salarié exposé au cours de sa carrière à de tels risques.

L’employeur informe également le salarié de cette démarche. À défaut, ce dernier peut demander directement au service de santé au travail le bénéfice d’une visite médicale, durant le mois précédant la cessation de l’exposition ou son départ et jusqu’à six mois après la cessation de l’exposition (article R.4624-28-2 modifié du code du travail).

 Le décret ne précise pas le délai dont dispose l’employeur pour procéder à cette démarche.

Une fois informé, le service de santé détermine, par tout moyen, si le travailleur remplit les critères pour bénéficier de la visite et, le cas échéant, organise celle-ci (article R.4624-28-2 modifié du code du travail).

À l’issue de la visite, le médecin du travail établit un document dressant l’état des lieux des expositions du travailleur aux facteurs de risques professionnels, et le verse au dossier médical en santé au travail. Il met en place, le cas échéant, une surveillance médicale post-exposition ou post-professionnelle en se coordonnant, si nécessaire, avec le médecin traitant du travailleur (article R.4624-28-3 modifié du code du travail).

 

Par Laurence Méchin

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