[Présidentielle 2022] Droit de l'environnement : de l’écocide au bien-être animal, des questions discrètes, mais présentes

Absente des débats, la question du droit de l’environnement figure bien dans les programmes des candidats… qui continuent à marcher sur des œufs pour définir des contraintes industrielles qui n’entravent pas la bonne marche de l’économie. La question du bien-être animal s’annonce comme un chantier important du prochain quinquennat.

Surtout, ne froisser personne. Les candidats à l’élection présidentielle rêvant tous de réindustrialisation de la France, ils se font discrets quand il s’agit de fixer de nouvelles normes environnementales aux entreprises. Du moins au-delà d’efforts de décarbonation que même le Medef juge essentiels et qui feront l’objet d’aides massives quel que soit le nom qui restera le 24 avril. Au-delà aussi de quelques propositions qui ne toucheront pas directement l’activité économique, comme la dépollution des anciennes décharges ou la réduction massive des exportations de déchets promises par le président sortant. « Ce qui nous inquiète le plus, c’est la trajectoire environnementale d’Emmanuel Macron depuis le début de son mandat, estime France nature environnement (FNE) dans son analyse des programmes. Alors que la démocratie et l’écologie apparaissaient parmi les principaux marqueurs du tout début de son quinquennat, elles sont progressivement devenues de plus en plus périphériques. » 

Effort mondial 

L’ONG décrit le président-candidat comme « obnubilé par la croissance économique et le techno-solutionisme ». Un reproche fait aussi à Valérie Pécresse qui, « dans ses discours et interventions publiques, insiste quasiment systématiquement sur sa volonté de réduire les normes, notamment dans l’industrie et l’agriculture, ce qui est fondamentalement contradictoire avec les objectifs de réduction des impacts environnementaux des activités économiques », poursuit FNE.  

La présidente de la région Île-de-France concentre l’essentiel de ses propositions à l’international. Elle veut entre autres « relancer l’idée de Jacques Chirac de création d’une organisation mondiale de l’environnement » et interdire l’importation des produits qui ne respectent pas les normes environnementales en vigueur en France. Un point qui peut faire l’objet de lectures très différentes : faut-il proscrire les OGM à l’importation, par exemple ? 

Asap ne passe toujours pas 

Valérie Pécresse veut enfin, comme beaucoup de ses concurrents, renforcer la surveillance des établissements classés. Jean-Luc Mélenchon propose d’augmenter les effectifs des inspecteurs ICPE, de relever le seuil de l’amende maximale qui s’applique aux entreprises qui ne respectent pas les règles qui leur ont été fixées, et de créer une autorité de sûreté indépendante des risques industriels. Il veut aussi arrêter certaines activités jugées dangereuses pour les riverains des sites comme pour l’environnement. Exemple : la production d'engrais à base de nitrate d'ammonium. Le candidat propose enfin de revenir sur « les affaiblissements de normes environnementales et des mécanismes de participation publique décidée lors du précédent quinquennat », ce qui fait référence en particulier à la loi d’accélération et de simplification de l’action publique (Asap) que les ONG avaient fortement critiquée. 

Débats sur l’écocide 

Dans le même esprit, Anne Hidalgo veut « consacrer les droits de la nature » et inscrire dans la Constitution le principe de non-régression du droit de l’environnement. Elle souhaite conditionner les aides publiques à un strict respect de critères environnementaux et créer un défenseur de l’environnement, autorité administrative indépendante capable de s’autosaisir et d’enquêter afin de demander des sanctions disciplinaires. Elle promet enfin d’instaurer « un véritable crime d’écocide ».  

Yannick Jadot définit cet écocide comme « le fait de causer des dommages graves, durables ou étendus à l’environnement de nature à mettre en danger à long terme l’équilibre des milieux naturels ou susceptible de nuire à l’état de conservation d’un écosystème ». Le candidat écologiste porte la plupart des propositions de sa consœur socialiste. Il propose en outre un renforcement des sanctions sur le déversement des substances chimiques dans l’eau et une affectation d’une partie de la TGAP (taxe générale sur les activités polluantes) vers les politiques de prévention, de tri et d’économie circulaire des collectivités locales. 

La question animale en chantier 

Quel que soit le candidat élu, les entreprises devraient avoir davantage de comptes à rendre pour garantir le bien-être animal. Anne Hidalgo promet d’organiser des assises sur le sujet. Éric Zemmour de « renforcer les contrôles pour maltraitance animale dans les abattoirs et élevage intensifs ». Et Marine Le Pen d’accorder « une reconnaissance constitutionnelle aux animaux » et de leur créer un statut civil. Elle veut aussi renforcer les peines sanctionnant les infractions commises envers les animaux.  

Yannick Jadot demande quant à lui la création d’un ministère de la condition animale. Ainsi qu’une « interdiction de l’élevage en cage et des élevages d’animaux dédiés à la production de fourrure d’ici à 2025 ». Fabien Roussel veut enfin « mettre un terme à l’existence de structures comme l’ex-ferme dite de mille vaches, symbole de l'agriculture industrielle, ainsi qu’aux conditions indignes de transport et d’abattage des animaux ».  

 

Par Olivier Descamps

© Lefebvre Dalloz