[Présidentielles 2022] La santé environnementale, une question prioritaire… à gauche

Les pollutions générées par l’usage de multiples molécules chimiques posent des problèmes à la fois environnementaux et sanitaires. Conscients que leur encadrement, voire leur interdiction, s’oppose parfois aux intérêts des acteurs économiques, les candidats hésitent à se confronter au sujet. Le clivage gauche-droite est très marqué.

Amorce propose d’en faire la grande cause du quinquennat. Sous les radars, la santé environnementale fait trop souvent l’objet de propositions timides. L’association qui réunit collectivités et entreprises estime que l’on gagnerait à prendre le taureau par les cornes, en interdisant davantage de produits phytosanitaires, en créant une instance indépendante capable de regarder en face les impacts écotoxicologiques et sanitaires des plastiques, en installant un observatoire indépendant pour surveiller la qualité des sols et en s’attaquant plus sérieusement aux dépôts sauvages de déchets… Ce dernier objectif est largement repris par les candidats à l’élection présidentielle car il est consensuel. En général, ils hésitent en revanche à pointer du doigt les produits et les matières qui engendrent la pollution. Et donc à entraver la liberté des industriels, agriculteurs et des metteurs en marché. Le sujet s’avère très clivant politiquement.

Sus aux molécules dangereuses

Décidé à s’attaquer aux cancers pédiatriques d’origine environnementale, Yannick Jadot a répété à maintes reprises sa volonté de « se donner tous les moyens pour que l’eau, l’air, le sol, l’alimentation ne soient pas pollués » et « d’aller voir quels sont les effets d’un certain nombre de molécules ». Son programme prévoit d’interdire plusieurs d’entre elles dès 2022, puis de sortir des amendements et pesticides de synthèse en 2027 (comme Philippe Poutou). Interpellé par la Fédération hospitalière de France, Jean-Luc Mélenchon a lui aussi promis « une réévaluation de l’ensemble des substances chimiques utilisées sur le territoire français […] avec l’interdiction immédiate des plus dangereux ».

Marche arrière sur le glyphosate

Son de cloche radicalement différent chez Marine Le Pen qui ne veut pas entraver l’activité des acteurs économiques. « Il n’y aura désormais plus d’interdiction de substances actives sans solution équivalente et économiquement soutenable », assure-t-elle. Une position qui est aussi celle d’Emmanuel Macron. Le président sortant a justifié ainsi son recul sur la sortie du glyphosate annoncée en début de quinquennat. Pour la même raison, il n’a pas, pour le moment, repris l’un de ses slogans de campagne de 2017 qui était de placer la France « en tête du combat contre les perturbateurs endocriniens ». Bon nombre d’observateurs estiment pourtant qu’il s’est arrêté à mi-chemin.

Un contrat de filière pour l’agroalimentaire ?

Pour réduire les risques de pollution liés au simple fait de manger, Anne Hidalgo veut a minima « interdire la publicité à destination des enfants sur les produits alimentaires néfastes pour la santé ». Elle aimerait aussi « mettre en œuvre des contrats de filière sur cinq ans avec l’industrie agroalimentaire, mesurés et évalués autour d’objectifs d’amélioration de la qualité alimentaire (réduction du sel, du gras, du sucre) ». C’est une stratégie à peu près analogue que compte suivre Jean-Luc Mélenchon. Il propose d’imposer de nouveaux seuils à l’industrie et, côté emballages, veut « interdire totalement le plastique à usage unique, excepté dans le domaine médical s’il n’existe pas de substitut satisfaisant ». Moins disert, Nicolas Dupont-Aignan se contente de proposer « un grand plan de lutte contre la pollution par le plastique des océans et d’un plan Méditerranée ». Éric Zemmour veut un « grand plan de dépollution des sols ».

Qualité de l’air : des normes à revoir

Comme Valérie Pécresse, le candidat d’extrême droite se dit défavorable à toute idée de sur-transposition des réglementations environnementales européennes… sans préciser s’il souhaite durcir certaines d’entre elles à l’échelle communautaire. C’est le cas de Yannick Jadot, qui demande des normes de surveillance de la qualité de l’air alignées sur celles de l’OMS (organisation mondiale de la santé). Fabien Roussel a fait part, quant à lui, à l’association Générations futures de sa volonté de créer « une police sanitaire et environnementale européenne ». Alors que l’usage de plusieurs médicaments impacte aussi la santé environnementale, Jean Lassalle propose enfin de « rendre l’Agence européenne du médicament indépendante des laboratoires pharmaceutiques ».

 

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Par Olivier Descamps

© Lefebvre Dalloz