Un rapport préconise des retouches à la validation des acquis de l’expérience

Remis le 15 mars à la ministre du travail, un rapport suggère de repenser la démarche de validation des acquis de l’expérience jugée complexe et inadaptée. Parmi les axes de refonte, la prise en compte des "compétences transversales" et la création d’un portefeuille numérique d’aptitudes destiné à identifier les acquis formels, comme le diplôme, mais aussi plus informels.

Exit la validation des acquis de l’expérience (VAE) ! Place à la "reconnaissance tout au long de la vie" (RTLV). C’est ce que propose un rapport, remis mardi 15 mars, à plusieurs ministères, dont celui du travail. Objectif ? Ouvrir la reconnaissance de l’expérience aux compétences transversales. C’est-à-dire intégrer les soft skills dans la prise en compte des aptitudes professionnelles. Des savoir-être désormais jugés indispensables pour acquérir "de l’agilité et de l’adaptabilité" et mesurer le réel potentiel d’un individu à se mobiliser, à apprendre, à se questionner et à assumer des relations positives avec son entourage.

La VAE s’essouffle

Pour ses auteurs (*), en effet, l’enjeu est d’importance : "le contexte propre à la pandémie du coronavirus de 2020 rend ce besoin de changement encore plus urgent". Or, pour l’heure, la VAE ne répond pas à cet objectif "où la capacité à innover et à apprendre continuellement (…) sont devenus essentiels".

Surtout, le dispositif s’essouffle. A tel point que l’objectif initial de d’atteindre 60 000 VAE par an s'éloigne (24 642 en 2015). De fait, il cumule les handicaps : lourdeur du dispositif, hétérogénéité des pratiques d’accompagnement, multiplicités des acteurs, défaut de visibilité statistique et difficultés de financement…

Création d’une "appli" numérique

Pour réussir la bascule, le rapport, issu d’une lettre de mission de 2019, préconise de simplifier la démarche via la création d’une application numérique qui permettrait au candidat de centraliser toutes ses démarches, de manière individualisée. L’orienter vers une offre d’ingénierie conseil s’il n’a pas ciblé son diplôme, lui proposer la liste des compétences du diplôme ciblé. Ou mettre en place un parcours multimodal de montée en compétences si son expérience ne couvre que partiellement les champs du diplôme.

Portefeuille numérique de "compétences"

Côté pédagogie, les méthodes pourraient là encore évoluer en intégrant toutes les modalités de formation, action de formation en situation de travail (Afest), auto-formation et valorisation des acquisitions informelles par le biais d’un portefeuille numériques de "compétences" qui accompagnerait le candidat tout au long de son parcours. Y figurerait ainsi une liste de savoir-être identifiés par des réalisations, pratiques, aspirations, valeurs ou encore engagements d’un candidat.

Un "new-deal en matière de financement"

S’agissant de la prise en charge, les auteurs appellent à "un new-deal en matière de financement du système de validation". Dans le détail, ils se prononcent pour la réorientation d’une partie significative du plan d’investissement dans les compétences ; la mobilisation de budgets régionaux pour l’ingénierie-conseil et l’accompagnement des demandeurs d’emploi. Ils prônent également le recours au dispositif pro-A, au co-investissement et à l’abondement des branches professionnelles.

Une expérimentation aux résultats prometteurs

Sans attendre la remise officielle d’un rapport, le gouvernement a présenté, mardi, une expérimentation portant sur 146 personnes pour valider le bien-fondé de la méthode développé dans le rapport. Avec à la clef des résultats "prometteurs" : quatre mois après leurs inscriptions, 86 % ont obtenu une validation totale ou partielle de la certification visée dont 62 % en totalité, avec une durée de quatre mois contre 16 mois en moyenne dans les parcours de droit commun. Le ministère n’a pas donc pas hésité à lancer une seconde expérimentation, cette fois "à grande échelle" pour confirmer les premières tendances. Celle-ci, dotée d’un budget de 15 millions d’euros, vise à accompagner 3 000 salariés, aidants familiaux et demandeurs d’emploi, vers le diplôme d‘aide-soignant afin de répondre aux besoins de recrutement de ce métier.

(*) Claire Khecha, directrice générale de l’Opco Constructys lors du lancement de la mission ; David Rivoire, spécialiste de la VAE et Yanic Soubien, ex vice-président de la région Normandie en charge des politiques d’emploi et de formation professionnelle.

 

Par Anne Bariet

© Lefebvre Dalloz